L’Observatoire de la Dépense Publique (ODEP) lance une nouvelle alerte sur la mauvaise gestion des fonds miniers censés profiter aux populations des zones d’exploitation. Dans un rapport accablant, l’organisation révèle que seulement 213 millions de dollars sur les 310 millions attendus entre 2018 et 2023 ont effectivement été versés aux communautés locales.
Selon l’ODEP, cette situation résulte d’un système gangrené par la fraude, les détournements, l’opacité des marchés et une faible traçabilité des financements. Le mécanisme des DOTs (structures locales censées gérer ces fonds) se révèle être une "trahison" pour les populations, affirme Florimond Muteba, président du Conseil d’administration de l’ODEP.
«Des écarts de 16 milliards USD ont été relevés. Des projets sont budgétisés mais jamais exécutés. Des marchés sont attribués sans transparence. Et les communautés restent abandonnées dans la misère», dénonce-t-il.
Une redistribution injuste et inefficace
Mis en place pour réparer les inégalités territoriales générées par l’activité minière, les DOTs ont pour mission de financer des infrastructures essentielles dans les zones d’extraction : écoles, centres de santé, routes, forages d’eau, etc. Mais les espoirs placés dans ces mécanismes se heurtent à une gouvernance défaillante, souvent contrôlée par des élites locales ou des intermédiaires sans redevabilité.
L’ODEP dresse un constat sévère : absence de transparence dans l’allocation des marchés, projets fictifs, non-publication des budgets, et absence de contrôle citoyen.
Des recommandations fortes
Face à cette dérive, l’ODEP exige des réformes immédiates et profondes. Elle propose :
La mise en place d’une plateforme numérique de gestion et de suivi des fonds miniers, accessible au public ;
Des sanctions exemplaires contre les auteurs de détournements ;
La réalisation d’audits citoyens pour contrôler l’effectivité des projets ;
Une révision du cadre juridique encadrant les DOTs, avec plus d’exigences de redevabilité.
«Il ne suffit pas d’exploiter les ressources naturelles. Il faut que cette richesse profite réellement aux populations qui en subissent les impacts directs», insiste Florimond MUTEBA.
Un test pour l’État congolais
Alors que la RDC s’engage dans des réformes économiques et veut attirer davantage d’investissements miniers, ce scandale met en lumière la fragilité des mécanismes de redistribution et le risque de fracture sociale dans les zones minières.
Ce nouveau rapport de l’ODEP constitue un appel pressant au gouvernement, aux partenaires techniques et financiers, mais aussi aux citoyens pour une gouvernance plus rigoureuse et équitable des ressources du sous-sol congolais.
Ali Haddad