RDC | Procès contre Joseph Kabila : Pourquoi les mesures de Doha ne le couvrent pas

KITINFO.COM
0

Alors que le gouvernement congolais et le mouvement rebelle M23/AFC viennent de signer à Doha (Qatar) une déclaration de principes sur des mesures de confiance, un procès historique s’ouvre ce même jour à Kinshasa : celui de l’ancien président Joseph Kabila, poursuivi pour trahison, crimes de guerre, crimes contre l’humanité et participation à un mouvement insurrectionnel.

Une stratégie de Kinshasa ?

Ce timing interroge. Comment expliquer que les autorités congolaises lancent de telles poursuites au moment même où elles s’engagent dans un processus de paix avec un mouvement auquel Joseph Kabila est soupçonné d’être lié ?

Pour certains observateurs, il s’agit d’une stratégie calculée du pouvoir congolais. En maintenant Kabila à l’écart de l’accord de Doha, Kinshasa espère pousser le M23/AFC à révéler ou confirmer ses liens avec l’ancien président, accentuant ainsi sa responsabilité dans la crise sécuritaire actuelle.

Cette posture a été clairement exprimée par Jacquemain Shabani, vice-premier ministre et figure influente du régime :

«Joseph Kabila ? Nous n’attendons rien de lui. Il sera pris en charge par l’accord final de Doha. Ses partisans là-bas veilleront à l’y intégrer.»

Une phrase lourde de sous-entendus, qui semble placer Kabila hors du champ des négociations… mais bien au centre des enjeux.

Le parrain non assumé du M23/AFC

Officiellement, les mesures de confiance négociées à Doha concernent uniquement les membres endossés par l’AFC/M23. Or, Joseph Kabila n’apparaît sur aucune liste, ni dans les documents préparatoires de Doha, ni dans les échanges diplomatiques à Washington.

Et pourtant, plusieurs éléments suggèrent une proximité idéologique entre l’ancien président et le mouvement rebelle. Kabila a mené des consultations à Goma et Bukavu, sans jamais condamner le M23/AFC, et ses réseaux locaux restent actifs dans l’Est du pays. Toutefois, ni le Rwanda, ni les facilitateurs américains ou qataris ne l’ont reconnu comme acteur du processus.

Sa situation devient alors délicate : trop impliqué pour rester neutre, mais pas officiellement soutenu pour bénéficier des garanties de l’accord.

L'opposition politique, l’autre grande oubliée

Dans ce contexte, l’opposition politique non armée tente de rebondir sur la dynamique de Doha. Elle dénonce depuis 2023 une crise politique post-électorale en RDC, mais sans manifestations d’ampleur ni blocages institutionnels, ce récit peine à s’imposer.

Désormais marginalisée, cette opposition mise sur un "dialogue national sous influence extérieure", espérant que les puissances impliquées dans la médiation (notamment les États-Unis et le Qatar) imposent un cadre plus inclusif, qui leur permettrait de revenir dans le jeu.

La plateforme CENCO-ECC, de plus en plus critique à l’égard de Tshisekedi, soutient cette démarche, espérant que le M23/AFC exige dans l’accord final un dialogue politique élargi, piloté par des médiateurs étrangers.

Kabila, l’ultime espoir du dialogue internationalisé

De son côté, Joseph Kabila n’ignore pas que son avenir pourrait aussi se jouer à Doha. Ses partisans espèrent que, dans le cadre du dialogue final, les négociateurs intégreront une clause permettant l’amnistie ou la suspension des poursuites judiciaires, au nom de la réconciliation.

Car dans l’état actuel des choses, l’ancien président, devenu sénateur à vie, risque de subir seul les conséquences d’un conflit dont il n’a jamais officiellement revendiqué la paternité… mais dont il pourrait être l’un des grands inspirateurs.

La Rédaction 
Tags

Enregistrer un commentaire

0Commentaires

Enregistrer un commentaire (0)